Ginette Neveu est une violoniste française, née le 11 août 1919 à Paris 10e et morte le 28 octobre 1949 dans l’île de São Miguel (Açores).
pays : France
naissance : 1919
mort : 1949
professeurs : Jules Boucherit, Carl Flesch
notes : 1er Prix du concours Wieniawski en 1935
Sur Ginette Neveu
Lorsque l’avion de Ginette Neveu s’est écrasé en 1949, le monde de la musique a perdu un talent remarquable à l’apogée de sa carrière. Après avoir commencé les cours avec sa mère et fait ses débuts à sept ans, elle suit l’enseignement de Jules Boucherit au Conservatoire de Paris où elle obtient le premier prix, avant de poursuivre ses études avec George Enescu et Carl Flesch. Ce dernier lui offre une bourse après l’avoir entendue lors d’un concours à Vienne en 1931. Neveu apprécie beaucoup l’enseignement de Flesch : il ne souhaite pas modifier les qualités musicales qu’elle possède déjà, mais se contente de lui donner des conseils techniques.
Le fait de remporter le concours Wieniawski en 1935 est une sorte de coup d’éclat pour l’école française qui a connu une période de vaches maigres après le succès de Jacques Thibaud. Thibaud, en effet, décrit Neveu comme « la prêtresse » de la musique.
Neveu, comme en témoigne sa discographie, était très attachée à l’interprétation. Elle a un jour refusé de suivre les conseils d’Enescu concernant la Chaconne en ré mineur de Bach, déclarant : « Je joue cette musique comme je la comprends, pas d’une manière qui échappe à ma compréhension ». Ida Haendel a parlé de sa première rencontre, à l’âge de sept ans, avec l’adolescente Neveu au studio parisien de Flesch : …] son jeu était intense et passionné, son timbre large et son vibrato étendu. Son approche dramatique avait l’impact d’un volcan ». Il est intéressant de noter que les critiques new-yorkais – qui, à cette époque, appréciaient davantage l’école russe – ont trouvé un » manque de puissance » dans ses débuts aux États-Unis en 1937.
Ferruccio Bonavia, un élève de Joachim, l’a louée pour son apparent retour à un style plus ancien s’inspirant des théories de Joachim, Sarasate et Ysaÿe. Il n’aimait pas les principes modernistes, en particulier la « règle acceptée selon laquelle le vibrato est plus important que l’archet dans la production d’un son chaud et agréable », suggérant que Neveu avait plus de succès dans sa recherche de puissance et de variété tonale. Cela est amplement confirmé par ses enregistrements.
Il semble plus approprié de commencer par son Concerto de Sibelius avec l’orchestre Philharmonia sous la direction de Walter Susskind en 1945. C’est peut-être l’une de ses interprétations les plus célèbres et, à titre personnel, elle a contribué à me faire découvrir, à l’âge de douze ans, le monde fascinant des enregistrements historiques. Le Philharmonia lui-même est loin d’être parfait, avec de nombreuses notes de cuivre fendues et, bien sûr, le son orchestral que l’on associe à cette période, y compris les clarinettes employant le vibrato mais les hautbois sans aucun. Dès le début, le son de Neveu est sombre, puissant, voire menaçant. Elle commence à un rythme très régulier, de manière mesurée, avec un son typiquement profond et résonnant qui, bien que chargé de vibrato, est néanmoins généré principalement par l’archet. Il y a un certain nombre de portamenti, mais ils ont tendance à être assez rapides et légers. Le finale est riche en tonalités mais n’en est pas moins articulé et clair, tandis que le point culminant du mouvement lent est immédiatement saisissant dans une interprétation hautement chargée et captivante.
Neveu semble avoir été plus à l’aise dans le répertoire romantique, qui convient à sa riche sonorité et à son comportement manifestement passionné. Le Concerto de Beethoven qu’elle a interprété en 1949 avec l’Orchestre symphonique de la Radio du Sud-Ouest de l’Allemagne sous la direction de Hans Rosbaud, bien qu’il s’agisse d’une belle interprétation, est donc un peu moins réussi sur le plan de la tonalité. Il est intéressant de noter que ses doigtés ressemblent beaucoup à ceux de Joachim, bien que la cadence soit celle de Kreisler. Sa sonorité est pure et contrôlée ici, et certainement plus chaste (par exemple dans le mouvement lent) que dans d’autres répertoires qu’elle a enregistrés. Néanmoins, la fin du premier mouvement est fermement articulée et le début du finale est également percussif et clair.
Son Concerto de Brahms de 1946 est un autre de ses meilleurs enregistrements, bien qu’il n’ait pas tout à fait l’intensité de la chaleur blanche qui caractérise le jeu d’Adolf Busch décrit ailleurs dans ce livre. L’émotion brûlante de Neveu convient peut-être mieux à d’autres œuvres ; dans cette catégorie, on trouve une lecture superlative de Tzigane (1946) de Ravel – à mon avis la plus belle du disque – avec son élan artistique, sa fantastique sécurité technique dans les pizzicati de la main gauche et le son immense, riche et jamais dur de l’ouverture.
En tant qu' »instantané » de son style de jeu, son Poème de Chausson (1946) est un chef-d’œuvre. L’ouverture lente et contrôlée laisse entrevoir de manière intrigante d’extraordinaires réserves d’énergie interprétative et d’engagement personnel. L’utilisation d’accents agogiques peut sembler plutôt maniérée dans cette section d’ouverture, mais le vibrato intense et continu de Neveu semble à tout moment justifié musicalement : un sous-produit naturel de son jeu puissant et non un dispositif de simple embellissement tonal ou d’habitude stylistique. Sa Sonate Op. 108 de Brahms de 1949, accompagnée par son frère Jean-Paul, est tout aussi émouvante, avec des moments de puissance volcanique tout à fait extraordinaires (comme au début du finale), mais dans l’ensemble, c’est une interprétation beaucoup moins réussie, gâchée par une qualité d’enregistrement plutôt rude.
Neveu avait un talent puissant et personnel et elle est l’une des rares personnes sur disque à communiquer réellement malgré la distance du support d’enregistrement. On ne peut que s’émerveiller de l’expérience de l’entendre en direct, et pleurer la fin tragique de sa vie.
David Milsom (A-Z of String Players, Naxos 8.558081-84)
Enregistrements de Ginette Neveu
Brahms: Violin Concerto in D major, Op. 77
Ginette Neveu (violin)
Philharmonia Orchestra
Issay Dobrowen
Chausson: Poème for Violin & Orchestra, Op. 25
Ginette Neveu (violin)
Philharmonia Orchestra
Issay Dobrowen
Ravel: Tzigane
Ginette Neveu (violin), Jean Neveu (piano)
Ravel: Vocalise-étude en forme de habanera
Ginette Neveu (violin), Jean Neveu (piano)
Scarlatescu: Bagatelle
Ginette Neveu (violin), Jean Neveu (piano)
Falla: Danza Española No. 1
Ginette Neveu (violin), Jean Neveu (piano)
Chopin: Nocturne No. 20 in C sharp minor, Op. post.
Ginette Neveu (violin), Jean Neveu (piano)
Dinicu: Hora Staccato
Ginette Neveu (violin), Jean Neveu (piano)
Suk: Four Pieces for Violin and Piano, Op. 17
Ginette Neveu (violin), Jean Neveu (piano)
Debussy: Violin Sonata in G minor
Ginette Neveu (violin), Jean Neveu (piano)
Kreisler: Grave in C Minor in the Style of W.F. Bach
Ginette Neveu (violin), Bruno Seidler-Winkler (piano)
Suk: Four Pieces for Violin and Piano, Op. 17
Ginette Neveu (violin), Bruno Seidler-Winkler (piano)
Chopin: Nocturne No. 20 in C sharp minor, Op. post.
Ginette Neveu (violin), Bruno Seidler-Winkler (piano)
Gluck: Orfeo ed Euridice, Wq. 30, Act II: Melody (Dance of the Blessed Spirits)
Ginette Neveu (violin), Bruno Seidler-Winkler (piano)
Paradis: Sicilienne
Ginette Neveu (violin), Bruno Seidler-Winkler (piano)
Kreisler: Variations on a Theme of Corelli (Formerly Attrib. to Tartini)
Ginette Neveu (violin), Gustaf Beck (piano)
Strauss, R: Violin Sonata in E flat major, Op. 18
Ginette Neveu (violin), Gustaf Beck (piano)