Musiciens

Pierre Doukan

portrait de Pierre DoukanDe nos jours, Pierre Doukan est surtout connu comme pédagogue, auteur des fameux cahiers d’études progressives de L’école du violon.

Cependant, l’écoute des enregistrements de Pierre Doukan révèle sans l’ombre d’un doute qu’il fut un immense musicien.

Pierre Doukan (1927-1995), a étudié le violon au Conservatoire de Paris dans la classe de René Benedetti, où il obtient un 1er prix en 1946. Finaliste du concours Reine Elisabeth en 1951 et 1955, il fut également lauréat du concours Paganini à Gênes en 1957 (second prix ex-aequo avec Accardo, pas de 1er prix décerné).

 

En 1959, il devient 1er violon de l’orchestre de l’Opéra. Il enseigne au Conservatoire de musique de Paris de 1969 à 1992.

 


Enregistrements de Pierre Doukan

Finale Reine Elisabeth 23 mai 1951 : Pierre Bernard Doukan – Brahms
https://concoursreineelisabeth.be/fr/multimedias-detail-lien/doc/8366/audio/

Finale Reine Elisabeth 24 mai 1955 – Lalo
https://concoursreineelisabeth.be/fr/multimedias-detail-lien/doc/8478/audio/

Pierre Doukan Erato
Le coffret Erato comprend les sonates de Franck, Fauré, Ravel, Roussel, Schumann, Grieg n°3, et Tzigane.
Pierre Doukan Thérèse Cochet
Les deux disques édités par Thérèse Cochet, pianiste (et femme de Pierre Doukan) contiennent :
Sonate pour violon seul n°3 d’Ysaye
Sonate en mi b de Beethoven
Sonate de Debussy
Concerto de Sibelius (orch. de Chicago, Jean Martinon)
Sonate de Mozart K380
Sonate de Ravel
Concerto n°2 de Bartok (Orch. de l’ORTF, J. Ferencsik)

Hommage à Pierre Doukan

Le Journal du CNSMDP – Numéro 22 (Janvier 1997)

Le Conservatoire rendait hommage, le 11 décembre 1996, à Pierre Doukan, disparu l’année précédente. Un concert en guise d’ultime reconnaissance de ses anciens élèves que nous prolongeons par des témoignages et les extraits d’un article du maître

Marc-Olivier Dupin

Pierre Doukan est indéniablement de ces musiciens qui auront profondément marqué la vie musicale française et internationale pendant de nombreuses années ; ce qu’il aura réalisé et créé demeurera dans les institutions comme dans la mémoire de chacun de nous.

Au Conservatoire, il a énormément donné. Sa classe fut, tout au long de sa carrière d’enseignant, le creuset de violonistes brillants, virtuoses et  » pensants « . Rares sont en effet les musiciens qui sont aussi de vrais intellectuels au sens noble du terme et qui savent transmettre une authentique réflexion sur leur art en restant proches du domaine du sensible. La hauteur de vue ne l’empêchait jamais d’être réaliste : sa vision moderne du métier, sa capacité à prendre les étudiants de façon pragmatique là où ils se trouvaient pour les mener loin, beaucoup plus loin, sa facilité à s’adapter aux mondes institutionnels ne sont que quelques-unes de ses immenses qualités.

Enfin, à titre personnel, je tiens à ajouter combien je regretterai la qualité de ses conseils ainsi que sa profonde et discrète humanité.

Jean-Sébastien Béreau

Exemple rare chez un artiste de cette envergure, lauréat des plus grands concours, Pierre Doukan a choisi de se dévouer complètement à l’enseignement, et plus spécialement celui du métier d’orchestre, terrain sur lequel il n’a pas du tout été remplacé. Pour lui, cela constituait un travail aussi valorisant que celui de soliste, quel que soit le rang occupé dans l’orchestre. Contrairement à beaucoup de musiciens actuels, avant d’être violon solo de l’orchestre de l’Opéra de Paris, il avait vécu dans le ventre de l’orchestre et avait pu, tout à loisir, en sonder les reins et les coeurs… Il pouvait donc en connaissance de cause exiger le maximum des musiciens, et spécialement des jeunes qu’il formait. Ses qualités de patience et de générosité étaient à la mesure d’une exigence, qu’il savait parfaitement moduler selon les capacités de chacun.

Jacques Ghestem

Sa personnalité, marquée par une profonde honnêteté envers les compositeurs et leurs oeuvres et une extrême exigence en matière de qualité instrumentale, transparaissait dans son enseignement, notamment dans la classe de violon solo qu’il a créée. Au-delà de la technique, il a su y communiquer une véritable philosophie de ce poste à responsabilités, à une époque où il n’avait guère suscité en France de tradition. Avec pour but suprême le service de la musique, sans concession aucune.

Olivier Charlier

L’enseignement de Pierre Doukan pourrait se définir comme une réflexion sur la vérité sensible de la musique : l’inspiration, basée sur l’instinct de l’interprète, doit constamment être transcendée par une pensée intellectuelle. Nous, les anciens élèves de Pierre Doukan, nous avons l’impression de former une grande famille autour d’un tronc commun de recherche et d’exigence personnelle au service d’une pensée musicale. Il nous a appris à préserver un équilibre subtil entre le respect du texte que nous avons pour mission de transmettre et notre propre sensibilité, une précaution que l’enseignement du violon en France négligeait parfois, cause de la difficulté de nos instrumentistes à jouer ensemble en orchestre, comme fondus en un seul corps musical.

Pierre Doukan : libres réflexions sur l’enseignement du violon *

Comme tout langage, la musique est un ensemble complexe de signes permettant la communication ; comme toute manifestation d’art, elle est l’expression d’un idéal esthétique.

L’objet de tout enseignement artistique est de permettre d’accéder au stade de la spiritualité de toute oeuvre d’art, par la maîtrise des moyens manuels propres à chaque art. La connaissance du langage et la révélation du message profond qu’il renferme sont les deux axes qui vont alimenter les années d’études des futurs musiciens. […]

La réussite passe par la maîtrise de l’instrument. Celle du violon répond à quatre exigences interdépendantes : la hauteur du son (justesse), sa durée (rythme), sa couleur (sonorité), le phrasé (accentuation, coup d’archet). Elle s’articule autour de six éléments fondamentaux : justesse, régularité du mouvement et de la force des doigts pour la main gauche ; coup d’archet lié, coup d’archet marqué, coup d’archet détaché pour la main droite.

Dès lors se posent quelques tâches primordiales, pour lesquelles le pouvoir de conviction et de persuasion du professeur est essentiel : faire comprendre que l’esprit de la musique est entre les notes, que l’instrument n’est pas le but mais le moyen d’expression, qu’il faut apprendre à s’écouter après s’être entendu jouer, que parler en musique c’est, pour un violoniste, faire de l’archet un objet vivant, enfin que l’humilité est la première vertu d’un interprète. […]

* Article paru dans la revue Marsyas, n°3-4, décembre 1987. Reproduit avec l’aimable autorisation du Centre de ressources de la cité de la musique.

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